Les anciennes salines
Encore une très belle randonnée à partir de Château d'Oléron à travers le marais, les anciennes salines puis sur le sentier du littoral inondé de lumière…
Il suffit de passer la porte d'Ors, de longer les remparts de la citadelle (fortifiée par Vauban bien sûr !) avant d'entrer dans les anciennes salines. Du XIe au XIXe siècle, l'île d'Oléron est reconnue comme le site d'exploitation du sel le plus productif de l'Atlantique sud avec l'île de Ré…
Les marais sont aujourd'hui un espace de contemplation : seuls bipèdes ce jour-là, nous avançons à pas lents, comme suspendus entre nuages légers et reflets salés…
« Figurez-vous une glace appliquée sur le sol et une échelle couchée sur cette glace, ou mieux encore une fenêtre posée à plat avec son châssis et ses vitres ; donnez à cette fenêtre un quart de lieue de tour. Vous aurez un marais salant. Quand la vitre se dépolit, c'est que le sel se fait. Représentez-vous une langue de terre longue, plate, étroite, qui apparaîtrait au regard couverte de ces immenses fenêtres laissant à peine entre elles d'étroites bandes de terre aux ajoncs et aux tamarins ; ça et là quelques prairies, quelques champs de vigne, qu'on engraisse avec des varechs et qui donnent un vin huileux et amer, quelques bouquets d'arbre, quelques sentiers… »
Victor Hugo sur l'île d'Oléron (1843)
Après avoir pleuré son sel pendant des siècles, ces marais occupent un vaste espace : lieux grandioses s'il en est, où les aigrettes, bernaches, canards, huîtriers-pie, goélands et autres migrateurs en villégiature vont, viennent, reviennent, se multiplient… Ils ont été nos seuls compagnons, curieux, parfois effrayés, étonnés de nous voir divaguer dans leur royaume…
Et dans l'été renaissant, nous passons par des hameaux de l'intérieur — les Moulins, les Briganières, la Beaucousière, Grésillon, le Deu, le Riveau, le Chaudron, le Maine, Trillou… — nous suivons de minces sentiers, zigzaguons dans les marais jusqu'au chenal d'Oron où nous attend un arbre, planté là comme un parasol au-dessus des parcs à huîtres…
Parcelle d'eden aux herbes folles, remparts de buissons colorés, cueillette de mûres, rondelles de saucisson, deux verres ballon et un petit litron de rouge, salades de mojhette de pont l'abbé d'arnoult (aussi goûteux que ceux de paimpol !), tartelette aux mirabelles, les randonneurs du dimanche festoient… « La terre chantera comme une toupie dont nous tirerons la ficelle d’or… » nous souffle Georges Limbourg depuis sa Boîte aux coquillages.
La navicule bleue
Ce n'est ni une figure de style ni une navette à passagers !
La navicule bleue est un avatar du mystère, un suspense de la nature, tout le monde en parle , personne ne l'a vue. On guette ses manifestations. On la supplie, elle n'apparaît jamais. Elle se « manifeste ». Sa périodicité est théologique, elle tient du Saint-Esprit. On la croit bleue, elle est verte. Elle est nomade, capricieuse et consubstantielle à l'huître quand ça lui plaît. C'est « l’or vert » d'Oléron dans son essence. La navicule bleue est une diatomée ou algue microscopique qui sécrète une substance colorante, la « marennine », dont la propriété est de donner au tissu de l'huître d'attractives nuances vertes.
Cette caractéristique est propre aux huîtres du bassin Marennes-Oléron…
Jean-Pierre Bosc Île d'Oléron p. 29 Éditions Ouest-France
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