dimanche 28 décembre 2014

Pays basque (2) : la vallée de la Nive


Espelette bien sûr !

Savez-vous que le fameux piment rouge (cultivé par les Aztèques, importé de Colombie et du Mexique par les Espagnols) était seulement utilisé comme épice pour relever le… chocolat ?

Nous avons donc délaissé le charme nonchalant de Biarritz, pour suivre la vallée de la Nive (affluent de l'Adour), au cœur du Labourd (une des sept provinces basques). En s'éloignant des côtes, les paysages n'ont pas encore la rudesse de la montagne sans être de plaine pour autant…

À peine arrivés à Espelette, nous nous laissons séduire par quelques délices locaux : fromage de brebis, vin d'Irouléguy, confiture de cerises noires… Sans oublier le traditionnel béret basque, rouge comme les piments !

Le Pas de Roland et le mont Artzamendi

Traverser quelques villages typiques : Ustaritz, Jatxou (prononcer Jatchou !), Larressore, Itxassou, s'enfoncer dans une gorge étroite avant de parvenir au Pas de Roland !

La légende donne deux versions : une veut que Roland, le neveu de Charlemagne soit passé là en partant à Roncevaux. Ce rocher lui barrait le passage. D'un coup d'épée, il transperça le rocher. L'autre dit que c'est son fidèle destrier qui réalisa l'exploit d'un coup de sabot ! À vous de choisir !

Face au mont Artzamendi (la montagne de l'ours) au sommet colonisé par les grands vautours fauves, les paysages sont verdoyants et magnifiques et la route surplombe ces pâturages dominant la vallée de la Nive.

Hasparen et Francis Jammes

Sur la route impériale des cimes qui relie Hasparen à Bayonne, nous découvrons la maison Eyhartzera (photo ci-contre) où vécut  Francis Jammes à partir de 1921 ; profondément attaché au Pays basque, le poète y vécut jusqu'à sa mort en 1938.

                  Laisse les nuages

Laisse les nuages blancs passer au soleil.
Il n’y a ici que toi, la terre et le ciel.
Ne pense à presque rien. Douces comme du miel,
auprès des cressons bleus les brebis viendront boire.
La fille chantera dans la métairie noire,
et sur la terre tiède il tombera des poires. (…)


Quelques église basques…

Lors de nos déambulations en terre inconnue, nous aimons pousser la porte d'une chapelle isolée en pleine campagne ou d'une église de village. Le long de la vallée de la Nive, nous avons découvert des lieux de culte à l'architecture particulière. En effet, la richesse du décor intérieur contraste avec la silhouette plus massive à l'extérieur…

L'église Saint-Fructueux d'Itxassou, toute blanche au milieu des arbres, est ceinte d'un cimetière riche de plus de deux cents stèles discoïdales. L'intérieur est somptueux, cerné dune galerie en bois (teint et ciré) tourné à trois étages, dont la moindre poutre, le moindre poteau, est décoré, semblable à celui de l'église Notre-Dame de la Bastide-Clairence (photo ci-contre).


Le chocolat de… Bayonne

C'est au confluent de la Nive et de l'Adour que s'installent les premiers ateliers de cacao français au XVIIsiècle. Aujourd'hui, sept artisans chocolatiers perpétuent la tradition à Bayonne. Regroupés en guilde, ils ont créé en 1993 une association œuvrant pour la notoriété du chocolat.

Pour déguster d'excellents chocolats, il suffit de suivre la rue du Port-Neuf : pas moins de quatre grands artistes chocolatier présentent des vitrines de délices au cacao… Nous avons fait une pause gourmande chez Cazenave, maison fondée en 1854 avec son salon de thé Belle Époque et avons préféré le chocolat chaud noir à l'eau ! Plus goûteux que celui préparé au lait.



jeudi 25 décembre 2014

Pays basque (1) : Biarritz


Le temps des baleines…

C'est depuis le plateau de l'Atalaye, que les guetteurs surveillaient l'arrivée des bancs et avertissaient les pêcheurs en allumant un feu. Les baleines étaient tuées au harpon, tirées sur le sable puis dépecées.

Bearriz était un village à l'intérieur des terres, mais la pêche à la baleine était la première activité des habitants. Les baleines font vivre les pêcheurs jusque vers la moitié du XVIIe siècle. Puis elles s'éloignent de plus en plus vers le large et les pêcheurs devront aller jusque vers l'Islande, Terre Neuve pour les trouver.

La dolce vita atlantique…

À partir du Second Empire, la ville est marquée par le sceau aristocratique. L'impératrice Eugénie a eu le coup de foudre pour l'ancien port de pêche. Biarritz sera : « la reine des plages et la plage des rois » jusqu'à la Belle Époque.

Aujourd'hui, nous découvrons une cité tournée vers le tourisme et surtout la surf culture. Une semaine à goûter son élégance nonchalante, ce qui fit dire à Victor Hugo lors de son passage en 1843 : « Je ne sache pas d’endroit plus charmant et plus magnifique que Biarritz Ici, l’océan a toutes les grâces, toutes les beautés, toutes les grandeurs ».

mercredi 24 décembre 2014

Joyeux Noël !



Les fleurs du printemps
sont les rêves de l’hiver racontés,
au petit matin,
à la table des anges…
Khalil Gibran
Le sable et l'écume

Depuis Biarritz, bercés par l'océan
nous vous souhaitons un
JOYEUX NOËL…

mercredi 17 décembre 2014

Un peu de littérature… des Balkans !


Au cœur des Balkans !

Loin des auteurs du Goncourt, du Renaudot, du Femina, loin du Prix Nobel, le Festival des Littératures européennes de Cognac animé par les médiathèques des Charentes et des Deux Sèvres, nous offre, chaque automne, la possibilité de découvrir des écrits venus d'ailleurs et de rencontrer leurs auteurs.

Ainsi, cette année, de septembre à novembre, nous sommes allés à la découverte de romans, de récits, d'auteurs originaires des Balkans :

Le Miel de Slobodan Despot (lauréat du concours)
Sarajevo Omnibus de Velibor Čolić (un de nos coups de cœur)
Cette nuit je l'ai vue de Drago Jančar (roman puzzle magnifique !)
Côme de Srdjan Valjarević (mon préféré ! )
Les enfants de Hansen de Ogjen Spahić 
California dream de Ismet Prcić

Nous vous invitons à aller faire un tour du côté de ces textes, de découvrir des écrivains bosniaques, croates, serbes, slovènes pleins de talent et qui éclairent parfois les convulsions de l'Histoire, de l'attentat de Sarajevo au conflit dans l'ex-Yougoslavie…

dimanche 14 décembre 2014

Avec vue sur la mer

     
     Le jour se lève. Elle le sent sous ses paupières closes. Le bruit de la rue lui parvient de très loin. Plus près, un chien aboie. Un oiseau chante. Un enfant pleure, ou bien rit. Les contours sont flous. Un parfum de fleurs, les effluves du jardin. Il faudrait ouvrir à la chienne. Elle tente de repousser les draps, de se redresser, mais son corps reste inerte. Une ombre incertaine s’agite. Elle ouvre les yeux. Réveillée maintenant. Elle ne bouge pas. Pas encore. Ni jardin. Ni chienne. Elle détaille le lieu. Où suis-je ? Ces murs jaunis de pénombre. Deux grandes ouvertures masquées de rideaux épais. Alignement de cadres de différents formats. Comme suspendus au plafond, là-haut, très haut. Deux  chaises vides face à face. Seuls meubles dans ce large corridor. Des bruits faibles de ventilateur. Une odeur de parquet ciré. J’ai dormi là, à même le sol ?


     Elle se lève, encore engourdie. Nuque raide, bouche sèche. Comme vêtue de poussière. Elle se sent happée par une tache de couleurs. Plus vives. Enfin une ouverture dans cette geôle de rêves diffus. Juste devant elle. Elle s’approche lentement. Encore un pas et elle peut voir. Au plus près. Entrer dans la peinture. Oui, c’est un tableau. En bas à gauche, un fauteuil crapaud vert fané. Posé sur un tapis rouge. À droite, un canapé une place, collée à une porte blanche. Trois patères noires au-dessus du fauteuil. Des murs jaune clair rayés de jaune plus sombre. Du jaune encore au plafond, à l’intérieur d’une corniche blanche où rampe une grappe de glycine. Et au centre une fenêtre ouverte. Encadrée de voilages fleuris. Ouverte sur la mer. Avec une plante verte sur le rebord, comme posée sur le mauve de l’eau.  Un vent tiède et léger gonfle les voiles des rideaux.


     Des parfums iodés et salés la pénètrent.  Son corps éveillé frémit. Elle se déshabille très lentement. Pose les étoffes tièdes et froissées sur un bras du fauteuil. Encore deux pas, et elle s’appuie, nue, sur le bois de l’ouverture. La surface des flots rayonne d’argent et l’irradie toute entière. Les galets de la plage roulent dans les vagues. Elle perçoit leurs roulements sourds et mats. Les têtes des palmiers griffent l’azur. Au-dessus de la fenêtre ouverte sur la mer. Oublié, la chienne impatiente derrière la porte. Oublié, le jardin à désherber, les messages en attente, le courrier abandonné, les courses au marché, le linge à repasser, le dîner à préparer, l’existence torsadée, le temps décoloré par les habitudes. Par la vie de chaque jour…

     Elle est là, debout, présente à la mer, à la mer toute entière. Elle se laisse chahuter par l’écume des vagues, balancer par les palmes des arbres. Elle joue avec les enfants et leurs cerfs-volants. Elle sourit au marchand de glaces. Il chante des airs d’opéra. Est-ce la fin de l’été ? Elle ne sait. Elle se penche à la fenêtre. Une colline boisée d’un côté. Le dôme d’un hôtel de l’autre. Passe un avion à basse altitude. Il va se poser là-bas, vers le couchant. Une sirène déchire le silence. Un frisson la parcourt. Elle recule. Aperçoit quelques mots sous le tableau. Chambre avec vue sur la mer. Henri Matisse. Huile sur toile. 73 x 61 cm. 1917-1918. Philadelphia Museum of Art, USA.
JeanPaul Colomb
19 novembre 2014 / 04 décembre 2014
Pour voir le tableau Chambre avec vue sur la mer d'Henri Matisse :

jeudi 11 décembre 2014

Venise (12) : les îles de la lagune

Murano : église Santa Maria e San Donato

     Située à 1,5 km de Venise, Murano est la plus grande des îles de la lagune. Elle est célèbre pour son industrie verrière qui remonte au XIsiècle.
     Aujourd'hui, les ateliers travaillent surtout pour l'industrie touristique. Nous avons choisi de flâner sur les quais et de visiter l'église Santa Maria e San Donato : le plus bel édifice de l'île et aussi la plus ancienne église de la lagune.
     Son sanctuaire remonte au VIIsiècle mais le très bel édifice roman fut construit en 1125. L'église est tournée de façon à montrer ce qu'elle a de plus beau : son admirable abside. Sur sa structure de brique qui se mire dans les eaux se détache une rangée d'arcades surmontée d'une galerie…


Torcello : une île presque déserte…

     Une terre solitaire au cœur de la lagune ! Torcello fut la première île de la lagune à être habitée et la plus peuplée : 20 000 âmes au milieu du XVIIsiècle ! Au Moyen-Âge, on compte pas moins de dix églises et même un siège épiscopal. Mais la malaria fera des ravages sur ce terrain marécageux et de roseaux infestés de moustiques.
     Nous avons aimé cette impression étrange où se mêlent malaise et enchantement… L'île apparaît aujourd'hui énigmatique et presque déserte : il y aurait moins d'une vingtaine d'habitants. À midi, nous nous sommes régalés de plats locaux servis par des Vénitiens que nous avons revus le soir sur le vaporetto, s'en retourner chez eux, sur la bande sablonneuse du Lido


Burano : un patchwork de couleurs

     L'ile de la lumière, l'ile harmonieusement silencieuse, oubliée de la Terre, vouée au culte de la mer.
Michel Desforgues

     À quelques kilomètres de Venise, Burano offre un visage très différent de celui des autres îles de la lagune : nul palais imposant, mais le décor uniforme de maisons sensiblement de la même hauteur, toutes peintes dans des couleurs vives.

     De petites bâtisses, d'un ou deux étages au maximum, aux façades semblables, percées de simples fenêtres carrées et privées de tout ornement, hormis ces tons éclatants qui les distinguent les unes des autres.
     Il semble bien que la tâche de peindre et de repeindre les habitations dans ces rouges profonds, ces jaunes claironnants, ces bleus intenses, ces roses fuchsia, ces verts avocat ou épinard, ces orange citrouille ou carotte, ait été autrefois confiées aux femmes de l'île. Les hommes, eux, étaient en mer.

     Ces couleurs vives, étincelantes devaient, selon la tradition, permettre aux pêcheurs de reconnaître de très loin leur foyer lorsque encore sur les flots, ils regardaient leur île. Leurs barques glissent sur les canaux, s'alignent, côte à côte, amarrées à la rive. Leurs filets sèchent, pendus dans les petites cours ou devant les maisons. 

Sur le seuil des maisons basses, le long du canal ou dans la rue, on voit les dentellières faire leur point fameux, non au fuseau, mais avec l'aiguille à coudre.

Maurice Barrès La Mort de Venise
Ce jour là, nous naviguons d'une île à l'autre dans la lagune vénitienne… Murano, Torcello puis Burano en fin de journée…

Nous attendons le vaporetto, sur le quai face au couchant et, telles deux anguilles, deux silhouettes surgissent, virevoltent, font demi-tour et puis s'en vont… 
Instant magique !


Sur la lagune,

alors que le rouge voile les flots,
le vaporetto
nous emmène
en lisière du Lido…
Venezzia, ciao
et à bientôt…

lundi 8 décembre 2014

Venise (11) : sans masque dans la nuit…



« Quand on est doué pour l'art de vivre, on est doué pour Venise» 

déclare Philippe Sollers, un « incurable » du lieu. 

Du premier au septième, elle fut la muse de tous les arts, s'offrant

dans la magie de sa lumière, se réfugiant dans l'ombre de ses palais,

s'exposant à nos désirs, nous renvoyant à nos fantasmes.

Venise… Son nom résonne comme une musique, à savourer le soir, à la 

tombée de la nuit, dans ses ruelles vidées des vagues de la foule…

Aussi, chaque soir, nous avons quitté notre nid de la calle Frezzaria, à 

la découverte des sensations nocturnes de la cité lacustre. Venise se sent, 

se respire avec Amour, main dans la main, sous la Lune…



Pas un bruit, des bruissements

seulement, des chuchotements

seuls les gondoliers doucement

se racontent la journée écoulée

leurs rames déposées bruissent

à peine sur le côté du quai

d'un rio à une fondamenta

une nuit inconnue nous fait signe…



Nos pas vont, chaussés de brume

sur les ponts de pleine lune

sur le sentier noir de mystères

l'air se parfume du vent

des quatre saisons de Vivaldi

ou d'un ave dans le lointain

nous allons, nous flottons sans savoir

que nous sommes princes chaque soir…




Invisibles, nous allons nulle part

invisibles, nous voyons dans le noir

se dessiner les façades engourdies

percées de vitrines illuminées

et ornementées de verres colorés 

surmontées de chapeaux en lambeaux

invisibles, nous glissons sur des dalles

de marbre usé, humide, ébréché… 


Sous les cieux silencieux

les oiseaux sont endormis

et nous devinons des danseurs

masqués de feuilles mortes

accompagnés de fées de soie

vêtues de dentelles précieuses

surgissant des labyrinthes

des passages mystérieux et suspendus

au-dessus des canaux de silence nu…
                                                                                              
                                                                                                                           jeanPaul Colomb