lundi 29 septembre 2014

Nuits romanes en Poitou-Charentes


Oh ! Quelles nuits !

La région Poitou-Charentes est semée de monuments romans illuminés l'été de multiples spectacles musicaux et autres… Quand la nuit s'installe, de Saint-Savin-sur-Gartempe à Baignes-Sainte-Radegonde, on peut voir, entendre…


… du jazz, du gospel, du blues, de la danse, de la chanson, du flamenco, de l'opéra, des arts du feu, du cirque, des musiques du monde, des contes, du funambulisme, chaque soir ou presque, du 28 juin au 13 septembre 2014…


C'est à l'Abbaye aux Dames que nous avons vécu notre première nuit romane avec un concert exceptionnel : 60 jeunes chanteurs de 20 pays européens (ensemble EUROCHOIR) sous la direction de Lone Larsen et Geoffroy Jourdain.


Exceptionnel par le répertoire choisi parmi les œuvres de Arne Mellnäs, Francis Poulenc, Karin Rehnqvist, Henning Sommero, Otto Mortensen, Vincent Manac'h pour finir par un Alleluia infini et sublime d'Eric Whitacre…
Je vous invite à écouter cet extrait enregistré ce soir-là :


Pour la soirée de clôture à Melle (79), quand les ténèbres commencent à allumer les étoiles, nous sommes invités à un Opéra urbain monumental, une Envolée chromatique ! La Cie Aérosculpture, la Cie des Quidams et Nano, nous  emmènent dans un autre monde, nous invitent à voler, à nous envoler dans le ciel de cette cité perchée au-dessus de la vallée de la Béronne.


Et notre émerveillement se poursuit après le spectacle : guidés par un balisage rouge, bleu et vert, nous déambulons à la recherche des trois églises romanes de cette cité située sur le chemin de de Saint-Jacques de Compostelle…

N'ayant jamais foulé les pavés de Melle, nous suivons les flux joyeux encore un peu dans les nuages, à la recherche des joyaux romans que sont Saint-Hilaire, Saint-Pierre et Saint-Savinien…


L'église Saint-Hilaire nous apparaît dans des langes bleus, ceinte de pèlerins d'un soir. Elle est classée au Patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO depuis 1998. C'est par le portail nord qu'arrivaient autrefois les pèlerins ; il est surmonté d'une niche dans laquelle figure en ronde-bosse le cavalier victorieux…


vendredi 19 septembre 2014

Depuis la porte d'Ors du Château d'Oléron


Les anciennes salines

Encore une très belle randonnée à partir de Château d'Oléron à travers le marais, les anciennes salines puis sur le sentier du littoral inondé de lumière… 


Il suffit de passer la porte d'Ors, de longer les remparts de la citadelle (fortifiée par Vauban bien sûr !) avant d'entrer dans les anciennes salines. Du XIe au XIXe siècle, l'île d'Oléron est reconnue comme le site d'exploitation du sel le plus productif de l'Atlantique sud avec l'île de Ré…

Les marais sont aujourd'hui un espace de contemplation : seuls bipèdes ce jour-là, nous avançons à pas lents, comme suspendus entre nuages légers et reflets salés… 
« Figurez-vous une glace appliquée sur le sol et une échelle couchée sur cette glace, ou mieux encore une fenêtre posée à plat avec son châssis et ses vitres ; donnez à cette fenêtre un quart de lieue de tour. Vous aurez un marais salant. Quand la vitre se dépolit, c'est que le sel se fait. Représentez-vous une langue de terre longue, plate, étroite, qui apparaîtrait au regard couverte de ces immenses fenêtres laissant à peine entre elles d'étroites bandes de terre aux ajoncs et aux tamarins ; ça et là quelques prairies, quelques champs de vigne, qu'on engraisse avec des varechs et qui donnent un vin huileux et amer, quelques bouquets d'arbre, quelques sentiers… »
Victor Hugo sur l'île d'Oléron  (1843)

Après avoir pleuré son sel pendant des siècles, ces marais occupent un vaste espace : lieux grandioses s'il en est, où les aigrettes, bernaches, canards, huîtriers-pie, goélands et autres migrateurs en villégiature vont, viennent, reviennent, se multiplient… Ils ont été nos seuls compagnons, curieux, parfois effrayés, étonnés de nous voir divaguer dans leur royaume…


Et dans l'été renaissant, nous  passons par des hameaux de l'intérieur — les Moulins, les Briganières, la Beaucousière, Grésillon, le Deu, le Riveau, le Chaudron, le Maine, Trillou… — nous suivons de minces sentiers, zigzaguons dans les marais jusqu'au chenal d'Oron où nous attend un arbre, planté là comme un parasol au-dessus des parcs à huîtres…

Parcelle d'eden aux herbes folles, remparts de buissons colorés, cueillette de mûres, rondelles de saucisson, deux verres ballon et un petit litron de rouge, salades de mojhette de pont l'abbé d'arnoult (aussi goûteux que ceux de paimpol !), tartelette aux mirabelles, les randonneurs du dimanche festoient… « La terre chantera comme une toupie dont nous tirerons la ficelle d’or… » nous souffle Georges Limbourg depuis sa Boîte aux coquillages.



La navicule bleue

Ce n'est ni une figure de style ni  une navette à passagers !

La navicule bleue est un avatar du mystère, un suspense de la nature, tout le monde en parle , personne ne l'a vue. On guette ses manifestations. On la supplie, elle n'apparaît jamais. Elle se « manifeste ». Sa périodicité est théologique, elle tient du Saint-Esprit. On la croit bleue, elle est verte. Elle est nomade, capricieuse et consubstantielle à l'huître quand ça lui plaît. C'est « l’or vert » d'Oléron dans son essence. La navicule bleue est une diatomée ou algue microscopique qui sécrète une substance colorante, la « marennine », dont la propriété est de donner au tissu de l'huître d'attractives nuances vertes.

Cette caractéristique est propre aux huîtres du bassin Marennes-Oléron… 

Jean-Pierre Bosc Île d'Oléron p. 29 Éditions Ouest-France

jeudi 4 septembre 2014

La tour de Broue



Aux confins du golfe des Santons

Une très belle randonnée, une randonnée particulière,


entre Saintes et Marennes, au départ de Saint Sornin.


Nous marchons sur le tracé de l'ancienne côte de ce qui


fut le golfe de Saintonge avec ses ports actifs au Moyen Âge,


avant d'être envasé et colmaté par les alluvions de la Charente,


d'être couvert de marais salants puis de pâturages aujourd'hui.


Partir près du clocher carré de l'église romane de Saint-Sornin,


s'approcher de la forêt où tremble une brise océane, puis


la dépasser, poser un pied délicat sur les anciens marais,


chercher en vain la cistude — minuscule tortue d'eau douce —


l'anguille ou la salamandre tachetée dans les roseaux typha ;


surprendre derrière les iris d'eau le cygne, la cigogne blanche,


le colvert ou la poule d'eau, la bécassine ou le héron cendré


le pipit maritime, la linotte mélodieuse ou l'oie cendrée…

… et parvenir au pied de la tour de Broue après avoir traversé

un paysage de polder où paissent des vaches normandes,


des blondes d'Aquitaine, holstein ou maraîchines…


Il s'agit d'une ancienne place forte du XIe qui protégeait le port


à ses pieds où l'on chargeait l'or blanc : le sel.


La tour fut prise par Du Guesclin (un Breton !) en 1372 


(en pleine guerre de Cent Ans !) ce qui lui permit de remettre


le Poitou et la Saintonge au roi de France Charles V.


Au loin, c'est le rivage de Marennes, royaume des huîtres…